Vomitosaurus
J’ai repris le travail hier déjà. Je n’ai pas l’impression d’avoir été en vacances.
Tout a été effacé d’un revers de main.
Dimanche, le frère de Josh et sa fille sont arrivés, ne me laissant pas le temps de me reposer sur mes lauriers.
Mardi soir, j’ai été malade à en crever. Je ne suis pas encore bien sûre de ce qu’il m’est arrivée.
Nous sommes allés au cinéma avec la petite pour voir les Trolls.
À la fin de la séance, je sentais qu’il fallait que je fasse un détour urgent aux toilettes à cause du stérilet et des règles ultra abondantes qu’il entraîne.
J’avais l’impression d’avoir du sang qui coulait le long de ma cuisse.
Devant une file d’attente qui dépassait l’entendement pour accéder aux toilettes, j’ai finalement décidé que j’attendrais d’être à la maison.
C’était moins pire que ce que j’imaginais.
Josh s’est campé sur son jeu sur l’ordinateur, son frère sur la console.
Sollicitée par la Petite, je l’ai aidé à faire son cahier d’activités pendant une petite heure jusqu’à ce que je n’en puisse plus.
Je me sentais barbouillée. Lourde. Nauséeuse. Je me suis levée en essayant d’avoir une attitude normale mais quelque chose clochait.
"Tu vas où Tata ?
- À la salle de bain.
- Mais attends ! J’ai pas fini mon coloriage.
- Je reviens tout de suite..."
L’appartement fait 35 m², j’ai cru que je n’atteindrais jamais la cuvette des toilettes à temps.
J’ai vomi, vomi et encore vomi. Avec le bruit des jeux vidéos, personne ne m’a entendue.
J’ai nettoyé les toilettes comme si rien ne s’était passé, je me suis brossée les dents puis j’ai aspergé mon visage avec de l’eau de fruit pour anéantir l’odeur de vomi qui m’imprégnait. Ce n’est que lorsque j’ai essayé de remettre mes cheveux en ordre que j’ai senti que cela n’allait vraiment pas.
Je pensais que vomir un bon coup m’aurait fait du bien mais cela n’a fait que me rendre encore plus malade.
Mes jambes ont commencé à flageoler. Des picotements familiers au bout de mes doigts et au sommet de mon crâne m’ont obligés à m’agenouiller sur la mosaïque froide de la salle de bain jusqu’à ce qu’une nouvelle vague de vomi viennent s’abattre dans les toilettes. L’odeur du désinfectant a accentué mes hauts-de-cœur et provoqué des bruits gutturaux dégoûtants. Je me suis écroulée sur le sol complètement vidée de mes forces.
Je ne sais pas combien de temps je suis restée là. Josh a fini par apparaître dans l’encadrement de la porte.
Il voulait que j’aille m’allonger dans le canapé mais je n’étais déjà même pas capable de me traîner sur un mètre.
Je me suis enroulée sur moi-même sur le caillebotis devant la baignoire.
J’essayais de maîtriser mon corps mais il ne se passait rien. J’étais complètement paralysée au sol.
Je luttais pour simplement rester consciente. Je suis restée seule pendant ce qui m’a semblé être un court moment.
Josh est réapparu avec une chaise.
"Je peux pas m’asseoir dessus.
- Pourquoi ? Qu’est-ce que tu fous bordel ? Tu vas pas dormir là quand même ?
- Je sais pas ce que j’ai. Je peux pas.
- Si ça va pas mieux, je te préviens, j’appelle SOS médecin."
Il est venu me soutenir pour que je me relève. J’ai posé mes fesses sur le rebord de la baignoire.
"Je vais envoyer un message à Lilie, tu peux aller chercher mon téléphone ?"
J’ai essayé de taper un message cohérent à mon amie médecin pour lui expliquer mes symptômes mais au bout de deux minutes, les fourmillements et le voile blanc sont revenus. J’ai donné mon téléphone à Josh et j’ai chancelé jusqu’aux toilettes pour vomir à nouveau tripes et boyaux.
Je me suis relevée pour me rincer la bouche dans le lavabo et je suis retombée presqu’aussitôt, à bout de force, sur le sol. Josh a fini par revenir en me disant qu’il fallait que je sorte parce qu’il avait besoin des toilettes. Il m’a aidé à me relever alors que je lui disais qu’il devait se dépêcher. Je n’ai pu rester debout que quelques secondes je pense avant de m’écrouler encore dans le couloir devant la porte fermée. J’ai gratté à la porte, trop faible pour serrer mon poing et frapper.
"Dépêche-toi...
- T’es sérieuse là ?
- Dépêche-toi...
- Mais je viens de fermer la porte… !"
J’ai encore vomi plusieurs fois devant la porte.
La Petite était juste derrière moi.
"Regarde pas, c’est dégoûtant !"
Josh a ouvert la porte. Je suis rentrée dans la salle de bain en lui demandant de me rapporter mon pyjama.
Il est revenu avec une tenue d’échauffement de danse… je l’ai entendu marmonner que c’était le bordel dans le placard. Je lui ai dit de regarder dans l’armoire à pharmacie car nous devions avoir des anti-spasmodiques. Il a fini par trouver au bout de plusieurs boîtes pour me tendre deux comprimés que j’ai recraché dans la cuvette quelques minutes plus tard.
J’ai cherché dans mon huile essentielle d’origan et j’ai envoyé Josh me rapporter de l’huile d’olive pour en boire une goutte diluée dans une cuillère à soupe me souvenant avoir lu quelque part que c’était efficace contre la nausée, la gastro et ce genre de trucs peu ragoûtants.
Je suis restée encore un moment toute seule pendant qu’ils mangeaient tous les trois de la raclette.
Lorsque Josh est revenu, il a trouvé que j’avais repris quelques couleurs. Il m’a porté jusqu’au salon avec une bassine où j’ai vomi mon origan et mon huile d’olive. Après ça, j’étais épuisée. Les garçons ont joué à la console et j’ai somnolé.
J’ai eu la bouche très sèche et pâteuse toute la nuit. J’ai beaucoup bu. J’ai mangé une banane au réveil et je suis partie au bureau. Comme si rien n’était arrivé.
Josh m’a avoué hier soir que je lui avais fait une peur bleue. Qu’en 4 ans, il ne m’avait jamais vu aussi malade.